Le Conseil des ministres a autorisé Manuel Valls à recourir au 49-3 pour la loi travail, rapportent des ministres à l'AFP. Le premier ministre a annoncé à l'Assemblée qu'il utilisera le recours constitutionnel dès ce mardi après-midi.
L'ensemble du gouvernement a été convoqué pour un conseil des ministres extraordinaire, ce mardi 10 mai, à 14h30 afin d'autoriser l'exécutif à recourir au 49-3 sur le projet de loi travail face aux blocages à gauche.
L'article 49-3 permet à l'exécutif d'adopter un texte sans vote avec engagement de la responsabilité du gouvernement. Cette arme constitutionnelle a été utilisée à trois reprises en 2015 sur le projet de loi Macron.
Avant même la décision de Manuel Valls, les présidents de groupe LR et UDI ont annoncé qu'ils étaient prêts à répliquer au 49-3 par une motion contre le gouvernement.
Le président des députés Front de gauche, André Chassaigne, a confirmé mardi que son groupe appellerait à la constitution d'une "motion de censure de gauche", avec des frondeurs PS. Le député Pouria Amirshahi (ex-PS) s'est dit prêt, sinon, à voter celle de la droite.
Jean-Luc Mélenchon, candidat à la présidentielle de 2017, a lui aussi appelé tous les députés à voter la censure contre le gouvernement. "Fin de règne crépusculaire : le recours au 49-3 pour passer sans débat et sans majorité la loi El Khomri contre le droit du travail ! Qui veut l’empêcher doit voter la censure !", s’exclame le fondateur du Parti de gauche dans un communiqué.
Les communistes, emmenés par Pierre Laurent et André Chassaigne, appellent aussi à censurer l’exécutif.
Dans la rue, le prochain temps fort aura lieu jeudi 12 mai, avec une cinquième journée de mobilisation (CGT, FO, FSU, Solidaires, UNEF, FIDL, UNL). S’y ajoutent Nuit debout et une grève reconductible des routiers appelée par la CGT et FO à partir du 16 mai.
Le mouvement Nuit debout, né le 31 mars dans la foulée de la manifestation contre le projet de loi, a toutefois appelé à se mobiliser dès mardi devant l’Assemblée nationale pour protester contre le recours au 49-3, une "attaque contre nos droits sociaux et notre démocratie".
Communiqué des Jeunes Socialistes : "Au-delà de l'opposition à de nombreuses dispositions de cette loi et à son esprit général, nous regrettons l'usage d'une disposition constitutionnelle que toute la gauche a, par le passé, jugée brutale et peu démocratique. Alors que la parole politique, et singulièrement celle de la gauche, souffre d'une profonde défiance, une telle décision affaiblissant le rôle du Parlement nous semble inopportune."
Aurélie Filippetti : la député PS, membre des frondeurs, s'est exprimé en marge des questions au gouvernement : "C’est un triste symbole que le gouvernement soit obligé de recourir au 49-3 alors qu’il n’a pas de majorité. C’est un aveu de faiblesse, et pour une loi qui veut reconstruire le dialogue social, c’est un aveu d’échec."
Eric Coquerel, du Parti de gauche: "Il s'agit d'un aveu d'échec : ce gouvernement n'a plus de majorité pour faire passer ses lois de casse sociale. Il n'a donc plus de légitimité politique. Il s'agit d'une forfaiture démocratique puisque le 49-3 n'est rien d'autre que le contournement brutal des élu-e-s du peuple."
Noël Mamère : "Ce n’est pas très glorieux pour la gauche de gouvernement, et c’est la raison pour laquelle plusieurs députés de gauche vont présenter une motion de censure", a expliqué le député de Gironde.
Le Nouveau Parti Anticapitaliste, dans un communiqué : "L'épreuve de force est désormais plus que jamais engagée ! La loi travail n'est ni amendable ni négociable, le gouvernement n'a aucune légitimité pour l'imposer à une population qui la rejette massivement."
Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France, dans un communiqué : "Incapable de rassembler une majorité pour faire passer le projet de loi El Khomri, le président de la République confirme qu'il n'a plus de légitimité pour gouverner. Ce recours au 49-3 est un aveu d'impuissance pour un gouvernement qui mène une politique contraire aux intérêts de la France et qui plonge notre pays dans le marasme économique."
Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force ouvrière (FO) estime "dramatique" l'utilisation du 49-3 : "C'est vraiment un gouvernement autoritaire, socialement, économiquement, droit dans ses bottes. Si c'était vraiment un texte de progrès social, il n'y aurait pas de problème de majorité, la majorité serait trouvée. Donc le 49-3, c'est parce qu'ils n'ont pas de majorité, y compris dans leur propre majorité."
Éric Woerth : "Le 49-3 est toujours un aveu de faiblesse. Maintenant ce texte a une histoire, il voulait effacer la déchéance de nationalité qui n’avait pas pu aboutir. Nous avions dit y être favorable dans sa première version, mais il en est à sa 250ème version. On ne peut pas voter ce texte-là. On ne sait d’ailleurs pas quel texte sera voté, on a bien vu qu’il évoluait dans un sens défavorable aux entreprises. C’est devenu aujourd’hui une sorte de monstre administratif", a expliqué le député et secrétaire général LR à BFMTV.