Le 16 avril, le syndicat Info'com de la CGT a publié sur son site internet une affiche téléchargeable. Elle fait référence aux violences policières commises contre des jeunes pendant les manifestations contre le projet de loi Travail.
C'est une affiche qui fait polémique depuis sa mise en ligne. Son message, la police doit protéger les citoyens et non les frapper. En dessous, une matraque sur un écusson de CRS près d'une flaque de sang, et encore en dessous, en lettres capitales, le message "Stop à la violence".
Plus d'un millier de délégués vont débattre jusqu'au 22 avril à Marseille des grandes orientations du premier syndicat de France pour les trois ans à venir. Les délégués doivent aussi confirmer le secrétaire général Philippe Martinez à son poste.
L'enjeu est de taille : la CGT a perdu des adhérents ces dernières années. Elle en a 686.000 aujourd'hui et a du mal à imposer ses idées dans un contexte social particulièrement tendu. D'autant plus que le premier syndicat de France est talonné par la CFDT et pourrait se faire dépasser lors des prochaines élections professionnelles.
Aujourd'hui, 50% des militants cégétistes ont plus de 50 ans. Le syndicat a du mal à toucher les jeunes, les précaires, les auto-entrepreneurs, les cadres et à s'implanter dans certaines entreprises.
Au lendemain de l'ouverture de son 50e congrès à Marseille, ce tract de la CGT, fait l'objet de toutes les critiques, d'abord chez les forces de l'ordre. "Cette affiche, je la trouve choquante. Cela heurte ma sensibilité de policier bien sûr, mais aussi de citoyen. On ne joue pas avec ça", explique Michel-Antoine Thiers, syndicat des cadres de la sécurité routière.
Deux syndicats d’officiers de police avaient déjà protesté contre cette affiche dans des communiqués séparés :
Pour le SCSI-CFDT (majoritaire chez les officiers de police), c’est une "affiche de la honte". "C’est faire injure aux milliers de policiers et gendarmes blessés ou tués dans l’exercice de leur fonction" , a-t-il écrit, ajoutant se réserver le "droit de porter plainte".
Synergie (second syndicat) a évoqué un "appel abject à la haine" et à la "violence" contre les forces de l’ordre. Il a demandé au ministère de l’Intérieur de "déposer plainte contre cette campagne calomnieuse".
Le ministre de l'Intérieur prend la plume, lui aussi dénonce une campagne choquante et conclut : "parce qu'ils sont en première ligne pour protéger notre pays [...], ils méritent notre respect et notre profonde gratitude". A droite aussi le tract fait scandale.
Bernard Cazeneuve a donc adressé une lettre ouverte au secrétaire général de la CGT, Phillipe Martinez. Dans ce courrier, le ministre rappelle que plus de 18.000 policiers et gendarmes ont été blessés en 2015, que huit ont perdu la vie et il appelle également à protéger, plutôt que de chercher à détruire, le lien de confiance entre la population et les forces de l'ordre.
Interrogé sur France Info, le député (LR) Eric Ciotti a jugé cette affiche "scandaleuse, indigne, honteuse". "Ce syndicat s'est discrédité. (...) A mesure que sa crédibilité diminue, il est contraint à la surenchère. Moi je demande très clairement au ministre de l'Intérieur de déposer plainte contre la CGT".
Sur radio France, la Co-fondatrice du Part de gauche Raquel Garrido parle d'une affiche maladroite. Mais à ses yeux, une procédure judiciaire contre la CGT serait sans conséquence. "Je comprends que les policiers puissent se sentir choqués, mais on est dans une société démocratique qui doit accepter un certain niveau de polémique...".
Le député et candidat à la primaire présidentielle des Républicains de 2016, Jean-François Copé a lui lancé une pétition sur internet pour "exiger les excuses de la CGT et le "retrait de son affiche scandaleuse !".
Le vice-président du Front national Florian Philippot, trouve cette affiche "immonde". "La CGT reçoit des millions chaque année de l'Etat, des collectivités, pour faire ça. Elle ferait mieux de défendre les salariés d'une manière un peu plus sérieuse plutôt que de commettre ces horreurs".
Le premier secrétaire du Parti socialiste Jean-Christophe Cambadélis a de son côté dénoncé mardi "une gauchisation" de la CGT, estimant que l'affiche du syndicat dénonçant les violences policières contre les jeunes "fait partie" de cette orientation.