C’était il y a un an. Deux immeubles vétustes s’effondraient à Marseille, dans le quartier populaire de Noailles, tout près du Vieux Port. Le drame de la rue d'Aubagne faisait huit victimes. Leurs photos restent affichées en permanence dans le haut de la rue d’Aubagne, désormais désertée. Mardi 5 novembre, l’émotion et la colère sont toujours aussi vives dans le quartier, où habitent toujours des proches des victimes.
Les immeubles écroulés ont été remplacés par une dalle de béton entourée par un grillage. "Rien n’a changé, la situation reste catastrophique", se désole Kaouther Ben Mohamed. La fondatrice du collectif "Marseille en colère" regrette l'absence de travaux de réhabilitation depuis un an. "Nous restons dans la gestion de l’urgence. Psychologiquement, c’est intenable. Les gens n’arrivent pas à vivre. Un an après, cette rue et ce quartier ne reprennent pas vie."
Dans le haut de la rue d'Aubagne, une demi-douzaine d'immeuble a été évacuée. la plupart des habitants n'ont pas réintégré leur logement. "D'autres habitants de la rue ne savent toujours pas s'ils pourront un jour rentrer chez eux. Du 69 jusqu'au 83, les immeubles ne seront a priori plus jamais réintégrés. Ils ont été préemptés par la métropole. Sauf qu'on n'a aucune visibilité et clarté sur leur devenir. Est-ce qu'ils vont être réhabilités, détruits, reconstruits ?" s'interroge Kaouther Ben Mohamed.
Plusieurs centaines de personnes, dont des proches, ont rendu hommage, en silence, aux huit victimes des effondrements d’immeubles insalubres des 63 et 65 de la rue d’Aubagne.
Les drapeaux de la ville de Marseille mis en berne, et une minute de silence a été respectée à l’hôtel de ville. Des cérémonies auxquelles ne participera pas le maire Jean-Claude Gaudin. Celui qui dirige la ville depuis 24 ans s’est recueilli dans l’hôtel de ville, avec plusieurs de ses adjoints ainsi que la présidente (LR) du département des Bouches-du-Rhône et de la Métropole Aix-Marseille et candidate aux municipales, Martine Vassal.
"En un an, nous aurons pris quantité de décisions sur l’habitat insalubre, c’est un problème national", a déclaré le maire, avant de dévoiler une plaque recouverte des couleurs bleu et blanc de la ville, portant les noms des victimes et assurant que la ville "ne les oublie pas". Elle sera installée "sur les lieux du drame" postérieurement.
— Jean-Claude GAUDIN (@jcgaudin) 5 novembre 2019
Le gouvernement avait promis après le drame une enveloppe de 240 millions d'euros pour rénover les logements insalubres de la cité phocéenne. Un an après, seuls 17 millions d'euros "auront été payés ou engagés par l'Anah (agence nationale de l'habitat) pour la rénovation de Marseille", révèle une source proche du ministre sollicitée par l'AFP.
"Cela a permis de prendre en charge des mesures d'urgence pour les familles du centre-ville, le lancement des études pour les opérations de rénovation de l'habitat dégradé du centre-ville ou encore des travaux d'urgence sur les copropriétés dégradées", a-t-elle détaillé. Les 240 millions, assure cette même source, seront versés "sur dix ans".
En attendant, plus de 3.200 Marseillais ont été délogés dans toute la ville suite aux effondrements de la rue d’Aubagne. La grande majorité n'a toujours pas trouvé de solution de relogement définitive.
Près d'un an après le drame de la rue d'Aubagne à Marseille, "il y a plus de 3.100 délogés mais aussi 100.000 personnes qui vivent dans des taudis", a indiqué jeudi 10 octobre, la Fondation Abbé Pierre (Fap).
Dans les Bouches-du-Rhône, selon des chiffres compilés par la Fap, 64.086 logements sont indignes (impropres à l'habitation, insalubres et/ou dangereux), et 115.000 sont sur-occupés.
L'arrivée surprise d'une élue de l'opposition, la sénatrice PS Samia Ghali, a réveillé une colère bien présente. La municipalité est la cible des critiques, accusée d'avoir laissé l'habitat insalubre gangréner Marseille.